85 ANS APRÈS LA RETIRADA  

LECTURES CONCERT 

MANUELA PARRA AUTRICE  

LIRA AMAIA 





DES FRONTIERES ET DES FEMMES 

SAMEDI  16 MARS 17H30  LUNEL  

AUDITORIUM DE L'ESPACE  CASTEL 

DANS LE CADRE DU PRINTEMPS DES POÈTES 

LECTEURS  Alexandre Pratlong  Manuela Parra  Zia Pratlong 

CREATION MUSICALE  : Ihab Radwan au Oud  Baptiste Gélineau  au saxophone

En présence de témoins et de descendants 


La nuit ne m’apporte pas la paix ni la tranquillité. Bien au contraire ! Je vogue encore dans la noirceur de ce temps humide au rythme imperturbable du caprice des vagues.

J’entends toujours les cris parmi le roulis. Il y a ceux des autres et il y a les miens. Avec le temps, ils sont devenus silencieux. Je les ai enfouis au plus profond de mes entrailles.

 Il y a la peur. Celle qui émerge au son des mots. Celle d’une langue obscure. Étrangeté musicale dénuée d’affection. Une langue russe mimée par des mains larges. Elles s’agitent, vocifèrent, décrivent, interprètent l’incompréhensible.

Il y a le froid. Ce froid impossible aux prises avec mon corps resté sur ce navire ; seule sur cette couchette dure où subsiste par endroit la forme de ma sœur quand elle s’allongeait à mes côtés pour me consoler.

Il y a d’autres enfants accrochés à leur peluche ou à leur pouce bien au chaud dans leur bouche. Le mien ne trouve plus son chemin de peur de rencontrer la quiétude, l’acceptation et l’habitude.

Je me vois, pauvre enfant de cinq ans, ballotée dans la coque du navire suivant du regard les lignes dessinées sur ses parois en fer, comme si elles allaient me ramener à ma terre-mère ou sur le ventre de ma mère, là où je posais ma tête le soir au creux de ses mains.

Je ne rêve pas. Ce temps a existé et depuis cinquante ans, il est ma nuit obscure. 


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